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Complémentarité d’échantillonneurs passifs et de bio-indicateurs pour évaluer la contamination en pesticides des eaux de surface de bassins versants agricoles

/ Pour effectuer un diagnostic de la contamination en produits phytosanitaires présents dans les milieux aquatiques continentaux, les gestionnaires des eaux s’appuient essentiellement sur une stratégie d’analyse chimique via une stratégie d’échantillonnage ponctuel. Mais cette méthodologie souffre d’un manque de représentativité temporelle et ne rend pas compte des effets biologiques induits par les pollutions. C’est ainsi que face à un besoin de compréhension de l’évolution spatio-temporelle et de l’impact de la contamination des milieux aquatiques, les gestionnaires se montrent aujourd’hui intéressés par les différents outils intégratifs chimiques (échantillonneurs passifs) ou biologiques (encagement de gammares, étude des communautés microbiennes) développés ces dernières années par les laboratoires de recherche, et notamment par Irstea. S’appuyant sur une convention ONEMA – Irstea, financé par le programme d’action national Ecophyto (Axe 3 Volet 4 : « Recherches sur les impacts sanitaires et environnementaux de l'utilisation des pesticides »), le projet « Développement d’outils et d’indicateurs pour mieux évaluer la chaîne pressions-impacts des pesticides sur les eaux de surface » vise notamment à évaluer ces nouveaux outils, leur complémentarité, leur opérationnalité et leur disponibilité pour les gestionnaires. A terme, ce projet ambitionne de développer un guide de mise en ½uvre de ces outils de suivi in situ pour l’appui au diagnostic de l’état et de l’impact de la contamination des eaux par les produits phytosanitaires ou à l’orientation et l’évaluation des actions correctives. Pour affiner ou consolider les méthodologies d’utilisation et d’interprétation des réponses de ces outils des applications in situ sont nécessaires. C’est dans ce cadre qu’une campagne de déploiement de ces outils a été réalisée en juin 2014 sur deux bassins versants choisis comme cas d’étude de typologie de contamination contrastée. - Le premier bassin versant choisi est celui de l’Ardières, situé dans le Beaujolais viticole, et soumis à une pression forte en produits phytosanitaires, a priori essentiellement des fongicides et insecticides. Trois points de suivi ont été sélectionnés sur la rivière, de l’amont dénué de vignes, vers l’aval de plus en plus occupé par les parcelles viticoles. - Le second bassin versant étudié est celui de la Coise, situé dans les Monts du Lyonnais, où l’élevage intensif bovin et la polyculture sont prédominants. Durant la période du mois de juin, le bassin est notamment soumis à une contamination en herbicides liée à la culture du maïs. Trois sites de suivi ont également été sélectionnés : un point sur la rivière de la Coise, et deux points sur deux affluents de celle-ci, caractérisés par des intensités d’usages agricoles différenciées. Sur ces sites d’études, 49 pesticides (28 herbicides, 9 fongicides et 12 insecticides) ont été recherchés par 2 échantillonneurs passifs distincts : la passive-SBSE (Stir Bar Sorptive Extraction) échantillonnant des molécules hydrophobes à moyennement hydrophiles et le POCIS (Polar Organic Chemical Integrative Sampler) échantillonnant une majorité de molécules hydrophiles. Ces échantillonneurs placés dans le milieu réalisent un échantillonnage en continu, et améliorent ainsi la représentativité de la qualité moyenne du milieu en permettant d’obtenir une concentration intégrée sur le temps d’exposition du capteur. Parallèlement, l’utilisation de bio-indicateurs a consisté i) d’une part dans le déploiement de gammares encagés (stratégie de monitoring actif) avec l’inhibition de l’acétylcholinestérase et le taux d’alimentation comme marqueurs étudiés car sensibles aux phytosanitaires, et ii) d’autre part dans l’étude des réponses des communautés autochtones (monitoring passif) à la présence de toxiques via la mesure de leur impact sur les communautés microbiennes et de macroinvertébrés (mesure de la dégradation de litières végétales), ainsi que sur les biofilms phototrophes péryphitiques (tests de toxicité aiguë basé sur l’approche PICT, « Pollution Induced Community Tolerance »). Le déploiement des échantillonneurs passifs a permis de caractériser le type de contamination des deux bassins versants et d’identifier des pressions différenciées suivant les sites. Sur l’Ardières un gradient de concentrations d’amont en aval en fongicides et insecticides a été mis en évidence à mesure que la surface en vignes augmente, traduisant bien la géographie et le contexte agricole du bassin. Sur le bassin versant de la Coise, une contamination en herbicides maïs est observée, avec des concentrations distinctes suivant les sous-bassins versants, en cohérence avec l’occupation du sol et la taille des bassins versants amont. Par ailleurs, les échantillonneurs passifs ont intégré des pics de contamination fugaces directement liés à des épisodes de crue, mettant en avant la présence de certaines molécules souvent mal échantillonnées par prélèvement ponctuel (par exemple l’acétochlore sur la Coise, des insecticides organo-phosphorés sur l’Ardières). Les bio-indicateurs ont permis de caractériser l’impact toxique de ces contaminations contrastées dans le temps et entre les deux bassins. Ainsi sur l’Ardières une diminution progressive de la biomasse fongique d’amont en aval est observée à mesure que les concentrations en fongicides augmentent. En aval, où les concentrations d’insecticides organo-phosphorés sont importantes, une forte inhibition de l’acétylcholinestérase chez des gammares encagés est observée. Les taux d’alimentation des gammares encagés et des communautés de macro-invertébrés autochtones démontrent une forte toxicité en aval de la rivière. Sur la Coise, l’inhibition alimentaire observée sur les gammares encagés a démontré des impacts biologiques variables dans le temps et dans l’espace sur le bassin, en rapport avec la caractérisation de la contamination réalisée grâce aux échantillonneurs passifs ; des tests de toxicité aiguë réalisés sur le biofilm phototrophe ont également montré une augmentation de tolérance vis-à-vis de l’acétochlore révélant une adaptation in situ des communautés péryphitiques à cette molécule (ou à d’autres herbicides présentant le même mode d’action), et prouvant ainsi un effet sur les communautés algales naturelles dans le milieu. Ces premiers résultats mettent en exergue la grande cohérence des réponses des différents outils, leurs apports spécifiques en complément des échantillonnages ponctuels et leur capacité à rendre compte de variations spatiales ou temporelles de la contamination (en nature de substances et en niveau de concentration). Ces essais seront consolidés sur les mêmes sites en 2015 et complétés par la mise en ½uvre des outils sur un nouveau bassin versant à dominante grandes cultures (bassin du Charlet au sud de Clermont Ferrand).

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